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Intervenir dans le secteur des médias dans des contextes fragiles ou de crise prolongée – marqués par la faillite de l’État, par de fortes tensions dans les communautés et entre elles, et par une situation socioéconomique très défavorable – crée une dichotomie entre, d’une part, les objectifs à long terme visant au renforcement des acteurs des médias et, de l’autre, les besoins urgents d’informations vitales pour la population. Les donateurs se situent au carrefour de ces éléments. Les projets en faveur des médias visent à réaliser les deux objectifs de développement à long terme (en contribuant à renforcer le secteur des médias dans un pays et à construire une société paisible) et à affronter les besoins urgents en termes d’informations vitales. Cette tension entre l’urgence d’un contexte de crise, qui peut être humanitaire, et la perspective d’un changement à long terme est conciliable avec la production d’information par les partenaires intéressés afin de répondre aux besoins urgents des personnes tout en contribuant aux changements systémiques et durables au sein de la société.

Les médias indépendants revêtent autant d’importance dans les contextes stables que dans les situations de conflits. Il est néanmoins nécessaire de se pencher plus particulièrement sur ces cas difficiles et de faire la différence entre les défis liés à une gouvernance autoritaire et les défis relatifs aux contextes de conflit et de crises humanitaires. En fait, les approches et les acteurs potentiels avec lesquels s’engager dans ces trois situations sont différents, même si certaines conséquences (en ce qui concerne l’accès à l’information et la sécurité des journalistes) pourraient être identiques. 

Dans ces contextes, il importe d’inclure des considérations sur la position et le rôle des médias dans la conception des stratégies du processus de paix et des réponses humanitaires, et de réunir les acteurs médiatiques autour de la table de discussion pour identifier les besoins et mettre au point des interventions. Cela implique une analyse globale, des six domaines de l’environnement médiatique, qui identifie dans quels domaines une action est possible sur le plan politique ou de la sécurité.

En tant que donatrice, la DDC doit avoir des attentes réalistes, et savoir que les interventions dans une seule sphère de l’environnement médiatique auront des résultats limités, et pourraient même être contreproductives (par exemple, fournir des équipements à des médias non professionnels dans des environnements polarisés ou fragiles alors qu’ils n’ont pas la formation nécessaire en déontologie et compétences journalistiques peut produire un effet de boomerang). Le secteur des médias local est souvent le miroir de la société. Ce qui signifie que, dans les contextes autoritaires et les situations de conflits ou de crise humanitaire, le secteur des médias est souvent fragile, divisé, financièrement tributaire des forces belligérantes, et les capacités professionnelles font défaut. Dans les pays soumis à un régime autoritaire et subissant un rétrécissement de l’espace public, il est probable que les médias indépendants n’aient pas le droit d’exister, et que les journalistes soient menacés, emprisonnés, voire tués. Dans ces pays, il y a lieu de restreindre considérablement les ambitions et de doter le programme de la flexibilité nécessaire pour s’adapter aux changements rapides et aux fortes pressions subies.

Malgré les tendances actuelles en matière de communication, de plus en plus orientées vers le numérique avec ses possibilités d'interaction infinies, la radio reste un moyen de communication majeur. La Fondation Hirondelle et le CICR ont réalisé un guide sur la communication radio dans les contextes humanitaires. Il est présenté à Bamako à l'occasion de la Journée mondiale de la radio, le 13 février.



Interventions potentielles

Interventions communes aux différents contextes :

  • Cartographier et surveiller la dynamique et les sources d’information et de mésinformation /désinformation  et de discours haineux en ligne et hors ligne.

  • Soutenir la capacité d’un noyau de journalistes et de médias les plus crédibles et les plus pondérés pour mieux identifier et contrer la mésinformation et la désinformation en ligne et hors ligne en produisant et diffusant une information fiable et factuelle, et un dialogue inclusif et équilibré. Pour y parvenir :

          • Formation sur les règles de base du journalisme éthique et professionnel, formation sur les thèmes pertinents en rapport avec les principales revendications des populations locales ;
          • Soutien à la capacité de ces acteurs médiatiques d’organiser des débats nationaux et locaux favorisant le dialogue inclusif, équilibré et constructif entre les décideurs et les populations touchées ;
          • Intervention au niveau des capacités techniques (électricité, équipements de production et de diffusion, connectivité et, en fonction de l’évaluation des habitudes de consommation de l’information des publics cibles, aide à la migration des médias hors ligne vers les espaces médiatiques numériques);
          • Formation et protection des journalistes et des acteurs médiatiques pour affronter les risques spécifiques inhérents à ces contextes. La formation pourrait aborder les mesures de sécurité à adopter lors des reportages dans les zones de crise, la sécurité numérique, la manière de traiter les traumatismes psychologiques, la compréhension de l’environnement juridique, etc.
  • Soutenir les programmes d’éducation aux médias et à l’information. Les bénéficiaires de ces programmes pourraient être les décideurs, les organisations de la société civile, les parties au conflit, les acteurs médiatiques mêmes, et la population en général.


Interventions spécifiques aux contextes  fragiles et affectés par des conflits :

  • Organiser des ateliers de formation communs entre les journalistes en exil et les journalistes du pays pour tisser des liens, des contacts, et instaurer la confiance dans la production de contenus.

  • Soutenir les initiatives des médias régionaux et les médias en exil. De nombreux exemples de soutien des médias en exil (Myanmar, Burundi, Iran, Érythrée, par exemple) proposent des solutions de rechange pour ceux qui ne peuvent pas travailler à l’intérieur du pays, à condition qu’ils soient capables de surmonter les contraintes pour ce qui est de la vérification des faits et des informations, de la sécurité et de l’accessibilité aux médias par les groupes de population les plus marginalisés.

  • Tirer parti des moments favorables occasionnés par les réformes législatives générales et la promotion de l’état de droit pour modifier les lois spécifiques et les institutions régulant le secteur des médias.

  • Soutenir les médias des Nations Unies ou d’autres initiatives soutenues au niveau régional ou international promouvant l’information de la population et les plateformes de dialogue. Cette approche devrait être basée sur une évaluation des capacités des médias locaux existants et, dans la mesure

  • du possible, dans la perspective du renforcement des capacités du secteur médiatique local et de l’ancrage de ce travail à plus long terme.


Interventions spécifiques aux crises  humanitaires :

  • Soutenir la production locale et la diffusion dans les langues locales de messages de service public en faveur de la sensibilisation au droit humanitaire et au droits de l’homme et fournir des informations sur les besoins de base, l’alimentation, la santé, les déplacements et la sécurité.



Ce qu’il faut garder à l’esprit

  • Pour pouvoir définir des stratégies solides tant pour les opérations de paix que pour les interventions humanitaires, il est nécessaire de distinguer deux approches différentes.

          • Approche journalistique : production de contenus fiables, indépendants et factuels pour toutes les parties ; création d’un espace sûr pour le dialogue public et les échanges de points de vue. Certaines organisations le désignent comme journalisme de paix ou journalisme sensible aux conflits (voir glossaire, annexe 2). En tous les cas, l’essentiel est que les règles du journalisme responsable et professionnel soient respectées.
          • Approche de communication stratégique : production de contenus médiatiques rationnels et / ou émotionnels (par exemple par des messages, des fictions, le théâtre, l’art) conçus comme des contre-récits. Dans ce cas, le but n’est pas seulement d’informer, mais aussi de convaincre et de remplacer un discours préexistant. Même s’il se peut que les communicateurs stratégiques privilégient aux processus descendants (top down) , des processus plus interactifs, le but ultime est d’amener le public cible à adopter le point de vue du diffuseur de l’information. Cette approche n’étant pas équilibrée, elle ne devrait pas être confondue avec et incorporée au développement de médias indépendants.
  • Selon le contexte, il peut être particulièrement important de favoriser le dialogue entre les groupes antagonistes dans les situations fragiles ou de conflits, ou, lors d’une crise humanitaire, entre les décideurs politiques et les communautés touchées. Dans tous les cas, le rôle des médias reste le même : créer un espace permettant un dialogue inclusif et équitable sur les principales revendications et des solutions constructives définies localement.

  • Le Sommet mondial sur l’action humanitaire qui a eu lieu à Istanbul en 2016 a appelé à une communication bidirectionnelle renforcée entre les acteurs humanitaires et les bénéficiaires (par exemple par l’intermédiaire des médias locaux), et à davantage de redevabilité envers les populations locales. Le réseau Communiquer avec les communautés sinistrées (CDAC) propose une liste d’intervenants spécialisés ainsi que des manuels relatifs à la communication avec les communautés touchées.

  • Enfin, mêmes dans ces contextes, il est nécessaire de mesurer les effets des programmes. Les Principes de Caux proposent huit recommandations  à garder en tête concernant la mesure de l’impact des médias en zones de conflits (Arsenault, Himelfarb et Abbott 2011).




Ressources supplémentaires

  • https://www.shareweb.ch/site/DDLGN/Thumbnails/critical.analysis.png

    A critical analysis of digital communications and conflict dynamics in vulnerable societies

    For a media intervention to impact conflict dynamics, it is necessary to understand the characteristics of digital communications and their relationship to conflict analysis and response, to know who the stakeholders are, how many need to be reached, and what kinds of media to use.

    Key Reading Document
    Internews
    2014
    Dr. Eran Fraenkel
    🇬🇧
  • https://www.shareweb.ch/site/DDLGN/Thumbnails/gfmd.png

    CVE and hate speech

    Further readings on CVE and hate speech. The Global Forum for Media Development (GFMD), a not-for-profit, Belgian registered ASBL, is a network of journalism support and media assistance groups established in 2005 in Amman, Jordan.

    Link
    GFMD
    2020
    🇬🇧
  • https://www.shareweb.ch/site/DDLGN/Thumbnails/fragile states.png

    Fragile states: The role of media and communication

    The briefing is designed principally for policymakers working to support development in fragile states. It draws on and summarises some of the conclusions drawn from earlier policy briefings published by BBC Media Action on the role of the media and communication in four fragile states – Afghanistan, Iraq, Kenya and Somalia.

    Key Reading Document
    BBC
    2013
    🇬🇧

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